Maladie de Crohn, corticostéroïdes et Kilimandjaro

Maladie de Crohn, corticostéroïdes et Kilimandjaro
Par Rasheed Clarke

Il y a quatre ans, Étienne Poulin était étendu sur un lit d’hôpital, terrassé par la douleur, alors que l’inflammation se répandait dans tout son organisme. Affaibli au point de ne pouvoir se tenir debout, Étienne ne trouvait de soulagement que dans les narcotiques et les corticostéroïdes. Pendant près de deux mois, il est demeuré cloué à son lit d’hôpital.

Entrepreneur et fabricant d’armoires d’expérience, Étienne se demandait ce qu’il adviendrait de sa carrière d’ébéniste en plein essor, et quel type d’avenir se dessinait pour lui. Cette épreuve venait s’ajouter aux nombreuses que ce jeune homme de 21 ans de Québec avait déjà vécues depuis l’âge de 16 ans, alors qu’il recevait son diagnostic de maladie de Crohn.

« Au départ, il y avait seulement des crampes et un sentiment de ballonnement après les repas, mais la maladie a graduellement pris de plus en plus de place dans mon quotidien. Les visites aux toilettes devenaient de plus en plus fréquentes, et l’inconfort était constamment présent dans mon corps entier, se rappelle Étienne. Avant de recevoir mon diagnostic, j’avais perdu plus de 20 livres, je n’avais pas d’énergie, et je ne pouvais avaler quoi que ce soit sans que mon corps ne le rejette. »

Après le diagnostic, Étienne a essayé un certain nombre de traitements, qui ont tous perdu leur efficacité à un certain moment. 

« Le seul médicament qui a réduit ma douleur était la prednisone, à forte dose, mais chaque fois où nous réduisions la dose, une poussée active survenait », déclare-t-il.

Bien que les stéroïdes aient apporté une certaine amélioration à l’extérieur du corps d’Étienne, il en allait autrement à l’intérieur : les stéroïdes amincissaient ses os, à un point tel que la tête d’un de ses fémurs a succombé à la nécrose. Étienne a été admis de nouveau à l’hôpital, cette fois pour un remplacement partiel de la hanche.

Les multiples séjours d’Étienne à l’hôpital, en plus de son opération à la hanche, ont atrophié les muscles d’Étienne à un point tel où il a dû recourir à une marchette pour se déplacer, ne fût-ce que de quelques pas. En travaillant avec son physiothérapeute, Étienne a lancé à la blague que son objectif n’était pas uniquement de retrouver la faculté d’effectuer des mouvements de routine, mais aussi de faire l’ascension du Mont Kilimandjaro.

« J’aime toutes les activités qui se font à l’extérieur, j’aime sortir de ma zone de confort, déclare Étienne. Que ce soit dans mes passe-temps ou au travail, j’essaie constamment de me dépasser ou de me mettre dans des situations où je dois assurer. »

Grâce à la physiothérapie, Étienne a pu commencer à prendre des marches. Ensuite, il s’est mis à aller au gym, puis, éventuellement, à pratiquer la randonnée en montagne. Alors que les muscles d’Étienne  se renforçaient, son tube digestif a lui aussi pris du mieux grâce à un nouveau médicament biologique qui éliminait les symptômes de sa maladie.

Le projet de l’ascension du Kilimandjaro, qui était initialement une blague, a fini par devenir envisageable. Étienne a commencé à aller plus souvent au gym, soit quatre fois par semaine, il s’adonnait souvent à la randonnée en montagne durant les weekends et il a transformé son expédition en campagne de financement.

« J’ai décidé d’appuyer Crohn et Colite Canada, car je suis la preuve vivante que la recherche aide les personnes atteintes de maladies inflammatoires de l’intestin à retrouver la qualité de vie qu’elles avaient auparavant », déclare-t-il.

Étienne a pu assez facilement trouver des personnes disposées à faire des dons. Il a dépassé son objectif de 2 500 $, mais il savait que l’ascension de la plus haute montagne d’Afrique serait plus difficile.

Le 8 février, Étienne est arrivé en Tanzanie. Chaussé de ses bottes de randonnée poussiéreuses de couleur beige et noir et armé des vêtements et des fournitures qui allaient être nécessaires pour toute la durée de l’ascension et de la descente, soit une semaine, il a amorcé la lente montée du Mont Kilimandjaro. Il allait devoir s’adapter à la baisse des niveaux d’oxygène et des températures, veiller à avoir l’énergie nécessaire pour marcher pendant plusieurs heures et faire le tout en gérant la douleur résiduelle consécutive à son opération de remplacement de la hanche.

Près d’une décennie après son diagnostic, et après quatre ans de tribulations et de traitements, Étienne est parvenu au sommet du Mont Kilimandjaro, à une altitude de 5 895 m, en six jours seulement.

« Lorsqu’on m’a dit que j’étais atteint de la maladie de Crohn, j’ai commencé à penser à tout ce que je ne pourrais jamais faire en raison de mon état. Lorsque j’étais à l’hôpital, je discutais avec une infirmière qui m’a fait comprendre qu’il était beaucoup plus facile de s’attarder aux choses que je pouvais encore faire, et de ne pas m’occuper du reste », déclare Étienne.

« Il y a du bon, même dans la maladie », dit-il en conclusion.

  • Les taux de ces maladies au Canada figurent parmi les plus élevés du monde.
  • 1 CANADIEN SUR 140 vit avec la maladie de Crohn ou la colite
  • Pour la première fois, les familles nouvellement arrivées au Canada contractent la maladie de Crohn et la colite
  • Depuis 1995, l’incidence de la maladie de Crohn chez les enfants canadiens de 10 ans et moins a presque doublé
  • Les gens sont le plus souvent diagnostiqué avant 30 ans.

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